Certaines victimes d'accident s'interrogent sur l'utilité d'avoir un avocat formé en dommage corporel auprès d'eux tout au long de la prise en charge de leur dossier. On comprend que la question puisse se poser dans la mesure où l'assurance a déjà pris contact avec la victime et est entrée en relation avec l'assurance adverse.
Pourtant ! première erreur à ne pas commettre. Pourquoi ? sachez que les assurances sont régies par des conventions établies entre elles. Notamment la convention IRCA applicable en cas d'accident de la circulation.
L'avocat a un rôle de gestion administrative du dossier.
Le tout premier intérêt véritable est de soulager la victime et ses proches. La victime et ses proches sont soucieux de l'évolution de l'état de santé et doivent s'y pencher sans être préoccupés par autres choses. L'avocat est un interlocuteur privilégié joignable au quotidien pour rassurer la victime et lui permettre de se décharger totalement de l'aspect administratif de l'affaire et d'éliminer une préoccupation.
Le deuxième intérêt : Il entre en contact avec l'assureur mais n'est pas partie prenante comme pourrait l'être deux assurances entre elles. il défend la victime objectivement.
Le troisième intérêt : Dans l'hypothèse où la compagnie d'assurance considérerait que la responsabilité de la victime est engagée, la victime seule est dans une impasse. L'intervention de l'avocat à titre amiable (et éventuellement judiciaire dans un second temps si nécessaire) peut débloquer la situation et permettre l'indemnisation.
C'était le cas dans l'un de mes dossiers. Ma cliente, victime d'un accident de ski avait reçu un courrier de l'assureur du responsable en indiquant qu'il ne prendrait pas en charge son dommage compte tenu des circonstances de l'accident. J'ai adressé un courrier amiable à la compagnie d'assurance en rappelant les règles applicables en matière de circulation sur des pistes de ski et le retour de la compagnie a été favorable. Elle a pu percevoir dans un premier temps une avance provisionnelle à valoir sur son indemnisation.
Le quatrième intérêt : constituer un dossier "béton" pour préparer l'expertise médicale amiable qui se tiendra ultérieurement. Pour cela, l'avocat a le rôle indispensable de mettre en relation la victime avec un médecin conseil de victimes qui ne travaille qu'avec des victimes et non des compagnies d'assurance. En effet, il faut savoir que lorsque la victime est seule face à la compagnie, elle n'est en relation qu'avec des médecins de compagnie d'assurance qui sont eux-mêmes officieusement partie prenante puisqu'ils travaillent pour la compagnie. Il faut savoir que le point de départ d'une bonne indemnisation est un bon rapport d'expertise médicale et pour cela il faut être bien accompagné.
L'avocat a un rôle de conseil extrêmement important tout au long du dossier :
Comme indiqué ci-dessus, le rapport d'expertise médicale établie est la clé de voûte de l'indemnisation du préjudice corporel subi par la victime. Le médecin conseil et l'avocat travailleront main dans la main pour mettre en évidence les préjudices subis par la victime et ne rien laisser au hasard. Pour cela, l'avocat et le médecin sauront - par l'intermédiaire de la victime - réunir les pièces pour faire retenir tels ou tels préjudices.
A titre d'exemple : pour une incidence professionnelle, il ne suffit pas de dire que la victime souffre au travail, il convient de justifier d'une adaptation de son poste de travail ou carrément d'une inaptitude au poste en rapportant les fiches de la médecine du travail par exemple. Sans cela, lors de la réunion d'expertise, le médecin de la compagnie refusera catégoriquement de retenir cette incidence professionnelle. Dans l'hypothèse où même devant l'évidence, le médecin de la compagnie ne veut pas retenir ce préjudice, l'avocat devra conseiller la victime en lui indiquant que ce poste peut être chiffré à tel montant et qu'il est opportun de poursuivre la compagnie pour obtenir gain de cause.
J'ai eu le cas dans un dossier où un jeune homme travaillant dans la restauration depuis 10 ans a subi une fracture de la rotule rendant son activité extrêmement pénible au point que la médecin du travail l'a déclaré inapte. Pour autant, la compagnie a chiffré ce poste de façon totalement dérisoire alors même que le préjudice était très lourd pour la victime contrainte de se former dans un autre domaine professionnel. J'ai conseillé à la victime de ne pas en rester là et d'en référer au juge qui nous a donné gain de cause en multipliant l'offre initiale de la compagnie par 7.
L'avocat a donc un rôle juridique permettant d'avoir toujours la possibilité de tenter de contraindre la compagnie :
L'avocat dispose d'une épée de Damoclès pour contraindre la compagnie quand la victime est dans son bon droit. En effet, si la victime est seule face la compagnie, cette dernière peut lui imposer des choix sans que la victime n'est la moindre possibilité de se défendre. Dans l'hypothèse où la compagnie est de mauvaise foi, être accompagné d'un avocat permet de rappeler à la compagnie que nous avons la possibilité de saisir le juge pour qu'il tranche.
La cour de cassation a rappelé récemment dans un arrêt de principe que les conseils en matière de réparation des dommages corporels étaient EXCLUSIVEMENT réservés aux avocats. En effet, la profession d'experts d'assurés ou d'experts en assurance est désormais considéré comme illégale. Ce n'est pas une profession réglementée, aucun diplôme n'est nécessaire et chacun s'improvise conseiller en dommages corporels. Attention aux escroqueries qui sont nombreuses dans ce domaine.
Attention également au système d'algorithme mise en place qui serait une machine qui établirait le montant de l'indemnisation de la victime sans prendre en compte les cas particuliers et le principe de l'indemnisation personnalisée de la victime. En effet, par exemple, pour une évaluation des souffrances endurées à 3/7 toutes les victimes toucheraient exactement le même montant, alors que pour une même évaluation, le contexte de souffrances de la victime peut être très différent selon qu'il s'agit d'un accident de la circulation ou d'une agression physique violente... il s'agit là d'une déshumanisation de l'indemnisation du dommage corporel alors même que les avocats de victimes, les médecins de victimes, tout ceux qui s'efforcent de défendre les victimes, se battent chaque jour pour faire en sorte que chaque victime soit reconnue en tant que telle avec sa propre histoire.
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